Eriliet, rien de tel qu'un thé pour s'hydrater

Eric avait rendez-vous avec Juliet. Et il était en retard. Il était toujours en retard,il fallait dire. Depuis son retour de cure, c'était devenu une habitude. Il essayait de la corriger, hein. Vraiment. Mais comment refuser des nuits complètes de sommeil lorsque pendant six ans il s'était contenter de cauchemars et de bars miteux ? C'est facile à comprendre.
Toutefois, il savait très bien que Juliet allait l'étriper. Il la connaissait assez bien pour ça. Les deux jeunes gens s'étaient rencontré grâce au hasard. Un jour, Eric avait bu plus que de raison. Mais vraiment beaucoup plus. Alors, il s'était retrouvé à l'hôpital. Il était tombée sur cette infirmière. Elle ne s'apitoyait pas sur son sort. Elle lui avait dit dans le blanc des yeux qu'il était un véritable abruti de se soûler comme ça. Eric ne savait pas trop pourquoi cette fois-ci il avait écouté. Mais il l'avait fait. Il s'était pris en main. Et elle l'avait aidé. Elle lui avait trouvé une place en cure de désintoxication. Elle prenait de ses nouvelles, venait le voir. Ils étaient devenus amis. Ils s'étaient tout raconter. Ils étaient un peu le psy de l'un et de l'autres. C'était une relation bizarre, mais assez fusionnelle. Ils pouvaient tout se dire sans avoir peur.
Eric arriva finalement au café. Dix minutes de retard. Elle allait le défoncer. Il l'aperçut, assise contre l'une des vitres de la devanture. Le jeune homme entra dans le café pour venir s’asseoir en face d'elle.
Je suis désolé ! J'ai fait une sieste et... voilà. Comment tu vas ?

Eric sourit à la réplique de Juliet. Elle adorait le taquiner. C'était elle la plus âgée mais elle pouvait être si enfantine parfois. Eric adorait ça chez elle. Il lui rappelait un peu sa fraternité qu'il n'avait pas connu depuis six ans déjà. Même si la plupart du temps, elle était là pour lui, pour l'aider. Et non pas l'inverse. Eric était prêt à n'importe quoi pour elle. Elle lui avait sauvé la vie. Malgré tout, même s'il la respectait énormément... c'était une amie. Une vraie. Cela ne le dérangerait pas du tout de tout lui raconter. Vraiment tout.

Je suis désolé ! Tu pourras m'infliger le châtiment de ton choix. Eric sourit et prit le menu dans ses mains. Il le parcourra rapidement. Mouais. Il n'y avait pas grand chose qui lui plaisait. Ça va. J'ai parfaitement dormi. Ça arrive tellement peu souvent, j'en profite ! Eric se tourna vers la serveuse qui venait de s'approcher. Une limonade, s'il vous plait. Eric reporta son attention sur sa meilleure amie. Au fait, merci pour la colocataire ! Depuis quelques temps, Eric vivait avec une jeune femme débarquée de New-York, s'il ne se trompait pas. C'était une connaissance de Juliet. Et c'était la seule qui n'avait pas eu une réaction de recul quand il avait énoncé son ancien et récent alcoolisme. Il l'avait donc prise. Et puis, c'était une connaissance de Juliet...

Eric regardait Juliet. Elle était complètement folle, cette fille. En temps normal, il y aurait eu très peu de chance pour qu'Eric et elle deviennent amis. Ils n'avaient pas le même caractère. Ils étaient deux opposés. Malgré tout, l'addiction d'Eric les avait rapproché. Elle l'avait aidé, elle était devenue sa marraine. Et sa psy, un peu aussi. Elle savait tout de sa vie. Strictement tout. Pour son ex-copine découpée par un psychopathe en passant par la mort subite de son père, sa fuite à Haven Hills et sa descente en enfer avec l'alcool. Il lui avait aussi parlé de sa famille. Ses deux frères... sa mère. Tout ça avait aidé Eric à se reconstruire, bien que cela lui ait fait beaucoup de mal. Il n'avait pas penser à tout ça pendant très longtemps, préférant noyer ces souvenirs dans l'alcool. Aujourd'hui, cela allait bien mieux. Il culpabilisait toujours un peu - surtout depuis qu'il avait fait des recherches sur les membres de sa famille et que ce n'était pas bien glorieux. Mais il essayait d'aller de l'avant. Pas à pas. Et Juliet l'y aidait.
Jade, quant à elle, le rassurait. C'était bizarre, mais il était apaisé d'avoir une autre présence dans l'appartement. Encore une fois, c'était grâce à Juliet qui l'avait mise sur son chemin. Il se disait qu'avec cette jeune femme dans son environnement proche, dans sa maison, à l'étage du dessus, il avait plus de chance de ne pas retomber. Et ça calmait ses angoisses.

Lorsque Juliet lui demanda ce qu'il en était du côté cœur dans la vie d'Eric, celui-ci la regarda avec un sourcil relevé. Toujours au même point, madame. J'aborde à peine le sujet avec mon psy. Tu sais, retrouver un certain goût dans la gent féminine après avoir vu... ce que j'ai vu. C'est pas franchement simple. Mais j'aimerais bien travailler là dessus. Je veux pas me morfondre jusqu'à la fin de ma vie sur quelque chose de passé. Me faut juste le temps. Eric attendit que le serveur dépose leurs commandes avant de continuer. Il chassa les souvenirs d'un mouvement de tête avant de sourire à son ami. Et toi ? Tu en es où ? Tu réussis à sortir malgré la crise d'adolescence ?

Eric se moqua de Juliet. Oui, il savait qu'Ophélie, sa nièce, était une adolescente compliquée à vivre. En même temps, à quatorze ans, on ne peut pas être facile à vivre. Surtout pour la jeune fille qui n'avait plus beaucoup de repères. Elle vivait avec sa tante, elle n'avait plus de mère, plus de grand-mère. C'était quand même un peu foireux comme histoire de famille. En fait... Juliet et Eric se ressemblaient assez bien, familialement parlant. Ils avaient tous les deux un bordel monstre dans leur historique familial. Même si Juliet, elle n'y pouvait pas grand chose - contrairement à Eric.
Alors, en théorie, pourquoi pas... faudrait voir avec Jade, par contre. Eric sourit en regardant malicieusement son amie. Par contre, je crois que ta nièce m'aime bien. Mais genre, m'aime trop bien. L'autre jour, je l'ai croisé dans la rue. Elle sortait du collège avec ses copines, je faisais un boulot, je sais plus ce que c'était. Et elle m'a présenté comme si j'étais une rock-star ou je sais pas quoi. Bon, cela dit, c'est compréhensible, j'suis beau gosse quand même. Mais j'te jure, on aurait dit des groupies ! Faudrait que tu lui parles à cette gamine. J'ai peur qu'elle me saute dessus. Eric laissa quelques secondes à son amie, le temps de profiter de son expression avant d'exploser de rire.
Il aimait tellement voir Juliet. Il pouvait vraiment rire lorsqu'il était avec elle. C'était fugace, mais c'était toujours ça de pris. Et il adorait. Il lui en était tellement reconnaissant...

Eric éclate de rire en voyant la tête de Juliet. Il adore l'embêter. Mais il ne lui a pas menti. Ophélie a vraiment un comportement limite lorsqu'il est avec elle et que sa tante n'est pas là. En même temps, elle a quatorze ans, Eric est un beau détective privé bien plus âgé qu'elle... ce n'est pas vraiment étonnant, en fait.
Eric calme finalement son fou rire et regarde Juliet avec le plus de sérieux dont il est capable. Elle a quatorze ans, tu peux pas lui en vouloir. Je suis sûr que toi aussi à son âge tu fantasmais sur des types plus vieux. Et puis, dis-toi qu'il vaut mieux que ce soit sur moi qu'elle ait des vues plutôt que sur un lycéen qui n'aurait aucun scrupule à vouloir la mettre dans son lit. Eric but une gorgée de son thé avant de continuer. T'inquiète pas, avec moi, t'es tranquille. Par contre, il va bientôt falloir que tu parles de ça avec elle. Elle est bientôt en âge de faire de genre de trucs et il vaut mieux qu'elle soit correctement au courant. J'ai déjà bossé sur des cas pas très jolis à voir... des parents qui me demandent de suivre leurs filles et... je les ai retrouvé dans de sales états...